Fin de l’utilisation du plomb dans les carburants, enfin !

Levez la main si vous faites partie de ceux qui ne se sont jamais demandé ce que signifiait le « sans plomb » proposé à la pompe à essence. Pas de grosse surprise en vue : cette expression veut tout simplement dire que l’essence ne contient pas de plomb ! Par définition, s’il y a du sans plomb disponible, cela implique qu’il y a un jour eu de l’essence avec du plomb. Et en effet, ça a bel et bien été une réalité pendant longtemps. L’utilisation du plomb dans les carburants a donc définitivement été arrêté. Nous vous expliquons les impacts et les enjeux de la fin du plomb dans l’essence avec un questions/réponses qui vous permettra d’y voir plus clair.

Pourquoi met-on du plomb dans l’essence ?

L’introduction d’additifs au plomb dans l’essence s’est faite à partir des années 20. Les raisons étaient alors multiples, et nous allons essayer de les résumer le plus simplement possible pour tous les non-spécialistes de mécanique.

Le plomb servait tout d’abord à lubrifier les soupapes du moteur, ce qui protégeait du même coup le dispositif. Il était ensuite particulièrement utile pour améliorer l’indice d’octane de l’essence.

Qu’est-ce que cela signifie ? Plus le taux d’octane est élevé, plus l’essence sera résistante à l’auto-inflammation : cela permet de retarder la combustion afin d’éviter le cliquetis du moteur, un phénomène qui peut à terme l’endommager. Pour résumer, ajouter du plomb à l’essence a permis d’augmenter la durée de vie des moteurs et de gâcher moins d’essence.

Forcément, au vu de ces atouts, la demande en additif au plomb a pris de l’ampleur année après année. Un rapport d’information publié par le Sénat expliquait en 2001 que « La production mondiale de plomb pour la production d’additifs aux carburants automobiles n’a cessé d’augmenter jusqu’au milieu des années 70, pour atteindre alors 380.000 tonnes de rejets par an. »

Quels sont les dangers du plomb ?

Comme ça a déjà été le cas par le passé, le choix « utile » de l’utilisation du plomb a totalement fait oublier les éventuels dangers. Malheureusement, concernant le plomb, ces dangers existaient bel et bien. Les particules qui étaient rejetées par les pots d’échappement sont allées se déposer partout autour de nous. Bien qu’invisibles, elles n’en ont pas moins été très néfastes. Pour l’environnement tout d’abord : la concentration de plomb sur les surfaces et dans l’eau a endommagé la biodiversité. Certaines espèces animales et végétales ont ainsi été directement impactées. Les sols agricoles ont également vu leur équilibre perturbé.

Les recherches qui ont été menées après les premiers signaux d’alarme concernant les effets du plomb sur la santé humaine ont aussi été accablantes. Elles montrent que cet élément chimique peut impacter le corps de multiples manières : capacités cérébrales, troubles neurologiques, pulmonaires, hépatiques et rénaux, problèmes moteurs ou d’équilibre sont notamment parmi les nombreux effets du plomb relevés. Tous ces soucis sont d’autant plus pregnants concernant les enfants, qui peuvent souffrir très tôt de troubles graves.

Étonnamment, ce ne sont pas les impacts du plomb sur l’environnement ou la santé qui ont poussé les pays développés à supprimer le plomb dans l’essence. Ce qui les a fait plier, c’est son incompatibilité avec les nouveaux moteurs : les pots catalytiques dont ont été équipées la plupart des voitures dans les années 90 ne fonctionnaient en effet pas correctement lorsque du plomb était présent.

Pourquoi continuer à mettre du plomb dans l’essence si l’on sait que c’est nocif  ?

Suite à ces constatations, l’essence au plomb a été interdite aux États-Unis dans les années 70, et dans les pays européens à partir de l’an 2000. Les différents types de sans plomb vendus à l’heure actuelle contiennent divers taux d’éthanol, qui a remplacé le plomb. L’Inde et la Chine n’en utilisent plus non plus. Pourtant, plus d’une centaine de pays dans le monde continuaient à commercialiser de l’essence au plomb dans leurs stations. Pourquoi cette utilisation s’est-elle poursuivie malgré les efforts continus de l’ONU et des ONG pour sensibiliser aux dangers du plomb ?

Pour trouver la réponse, il faut tout simplement se pencher sur les arguments pratiques et économiques. Les pays en développement ont souvent un parc automobile avec une moyenne d’âge bien plus élevée que celui des pays développés. Qui dit vieilles voitures, dit vieilles habitudes.

En supprimant l’essence au plomb alors que la plupart des véhicules roulent grâce à celle-ci, le risque de pénuries serait grand, engendrant d’autres problématiques sociales. Par ailleurs, ces pays ont aussi eu besoin de temps pour écouler leurs stocks d’essence au plomb. Grâce à la sensibilisation, aux arguments financiers (moins de problèmes de santé liés au plomb, c’est moins d’argent à investir pour le milieu médical, et donc des économies financières et humaines incontestables) et aux discussions stratégiques entre pays raffineurs, la liste des pays utilisant encore le plomb a progressivement réduit au fil des décennies.

Y a-t-il encore du plomb dans l’essence à l’heure actuelle ?

À ce stade, il ne restait donc qu’une poignée de pays dans le monde qui continuaient d’utiliser de l’essence au plomb. Ces cinq dernières années, seuls l’Algérie, le Yémen et l’Irak en proposaient encore dans leurs stations essence, mais ces deux derniers ont fini par rejoindre les rangs des « sans plomb » aux côtés des retardataires comme la Corée du Nord ou la Birmanie. Après une longue transition, l’Algérie a enfin terminé ses stocks d’essence au plomb et enterré pour de bon l’usage de ce carburant à l’échelle mondiale. Une actualité à fêter tant la nocivité de la substance est établie, et tant il a fallu d’années pour en venir à bout.

Les conséquences de la fin du plomb dans l’essence ont déjà été observées grâce à l’interdiction d’anciens gros utilisateurs : elles sont sans appel, et indiquent que les émissions de plomb dans l’environnement étaient principalement dues aux véhicules, puisqu’elles ont drastiquement diminué depuis les premières interdictions. Le Programme des Nations Unies pour l’Environnement va plus loin, et estime que « l’interdiction de l’utilisation de l’essence au plomb permettra d’éviter plus de 1,2 million de décès prématurés par an, d’augmenter les points de QI chez les enfants, d’économiser 2.450 milliards de dollars pour l’économie mondiale et de réduire les taux de criminalité ». Rien que ça !

Pourtant, tout n’est pas pour autant résolu. Le soufre contenu dans le diesel est cancérigène ; le monoxyde de carbone issu de la combustion du carburant altère l’environnement de différentes manières. Il reste donc d’énormes progrès à faire du côté automobile. Biocarburants, avancées technologiques pour les moteurs ou encore focus sur les voitures électriques font partie des options proposées. La solution la plus simple est néanmoins bien plus évidente : apprendre à se passer le plus souvent possible de sa voiture, et continuer d’exiger des mesures concrètes et rapides à nos états pour espérer freiner le réchauffement climatique tant qu’il est encore temps.

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