Réchauffement climatique : les annonces du 6e rapport du GIEC

La publication du sixième rapport du GIEC est prévue pour 2022. Cependant, les premiers constats disponibles ont déjà fait couler beaucoup d’encre. Les prédictions augurent le pire pour les générations futures, tandis que les climatosceptiques montent au créneau.
Sixième rapport du GIEC : des constats sans appel
Chaque rapport d’évaluation du GIEC est réalisé par cycles, qui s’étendent sur plusieurs années. Le prochain sera livré en 2022. À ce jour, 3 rapports rédigés dans le cadre du cycle actuel ont été rendus publics. Il ne s’agit pas encore de la version finale, mais les faits énoncés présagent en tout cas un avenir sombre sur le plan environnemental.
Rapport d’octobre 2018 : les conséquences en chiffres d’une hausse des températures de 1,5 ou 2 °C
Faibles en apparence, de telles hausses de température entraîneraient pourtant des conséquences non négligeables au niveau terrestre. Les vagues de chaleur devraient monter de 3 °C dans le cas d’une hausse de 1,5 °C et de 4 °C dans le cas d’une hausse de 2 °C. Les pluies torrentielles se feraient plus fréquentes dans les hautes latitudes de l’hémisphère nord, en Asie de l’Est et en Amérique du Nord. La biodiversité s’amenuiserait fatalement en raison de tous ces changements. En envisageant une augmentation des températures de 1,5 ou 2 °C, on compterait respectivement des pertes de 4 ou 8 % de l’habitat naturel des vertébrés, 6 ou 18 % pour celui des insectes et 8 ou 16 % pour celui des plantes. Par ailleurs, l’Afrique subsaharienne, l’Asie du Sud-Est et l’Amérique latine connaîtraient une baisse importante du rendement des cultures céréalières.
Sur le plan marin, on constaterait une perte des récifs coralliens allant de 70 à 99 %. Le niveau de la mer grimperait de 26 à 87 cm. Le réchauffement climatique cause également une diminution de la quantité d’oxygène dans les océans, ce qui provoque un rétrécissement de centaines d’espèces de poissons. Ainsi, les prises annuelles seraient réduites d’1,5 à 3 millions de tonnes. La banquise arctique, quant à elle, fondrait totalement une fois par siècle dans l’hypothèse d’une augmentation des températures de 1,5 °C et une fois par décennie dans celle d’une augmentation de 2 °C.
Rapport d’août 2019 : conséquences sur les sols
Depuis la période préindustrielle aux alentours de 1850, les températures des sols ont augmenté deux fois plus que la température mondiale. Ce phénomène a généré d’importantes désertifications, dégradations des sols et une insécurité alimentaire dans plusieurs régions du monde. Les écosystèmes sont par ailleurs menacés par de tels changements. 500 millions de personnes seraient touchées par la désertification et 800 millions affectées par les problèmes de sous-alimentation.
Les activités humaines liées à l’utilisation des sols, telles que l’agriculture et la foresterie, sont responsables de 23 % des émissions de gaz à effet de serre. En réponse à ces émissions anthropiques, les sols en absorbent une partie (environ 29 %), ce qui alourdit la menace qui pèse sur les écosystèmes.
Un quart des terres sont déjà dégradées par les humains en raison de leur réchauffement particulièrement rapide. De toute évidence, l’usage des pesticides, engrais et autres produits phytosanitaires participe grandement à cette détérioration. L’utilisation des fertilisants a été multipliée par 9 depuis 1961 et la quantité de bois consommée s’est accrue de 50 %. De plus, la montée de niveau de la mer pourrait entraîner des pertes sèches de terre.
Rapport de septembre 2019 : conséquences sur les océans et la cryosphère
La cryosphère correspond aux zones gelées du globe : la banquise, les glaciers, le pergélisol (permafrost)… Le rapport indique que la fonte rapide du pergélisol provoquerait la libération de CO2 et de méthane dans l’atmosphère, accélérant encore le réchauffement climatique. La hausse de température dans les océans touche tous les niveaux de profondeur, ce qui engendre des pertes d’oxygène (comme énoncé plus haut). Ce phénomène, combiné à celui de l’acidification des eaux, affecte la biodiversité marine.
Avec l’élévation du niveau des mers, la survenue des ondes de tempête, cyclones tropicaux et inondations se ferait de plus en plus fréquente sur les zones côtières. Les écosystèmes des littoraux subiraient eux aussi les conséquences de ces montées des eaux. La sécurité alimentaire ne serait plus assurée en raison de ce phénomène, mais aussi à cause de la modification des écosystèmes marins due au réchauffement climatique.
Ces 3 rapports du GIEC du cycle en cours sont disponibles sur le site officiel de l’IPPC [1] (NDLR : nom anglais du GIEC : Intergovernmental Panel on Climate Change).
Comment sont rédigés les rapports du GIEC ?
L’acronyme GIEC signifie Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat. Cet organisme a été fondé en 1988, à la suite d’une demande du G7, par deux organismes de l’ONU : l’Organisation Météorologique Mondiale (OMM) et le Programme pour l’Environnement des Nations Unies (PNUE).
Le GIEC réunit un groupe d’experts qui synthétisent les données scientifiques, techniques et socio-économiques internationales les plus pertinentes. Le but est de les évaluer de façon impartiale. 195 gouvernements participent à l’élaboration et à la validation des rapports. Cette diversité d’opinions et de cultures vise à éviter tout biais politique. Parmi les experts, des scientifiques, sociologues et économistes sont désignés comme auteurs. Les autres membres assurent un rôle de relecteurs. Afin d’affiner les informations réunies, plusieurs brouillons sont rédigés et soumis à de multiples relectures et corrections avant que ne soit livrée la version finale de chaque rapport.
Le passage auprès de centaines d’experts sur plusieurs années maximise la fiabilité de ces écrits. Il est toutefois arrivé par le passé que le GIEC reprenne des informations venues de sources trop lointaines. Des données du WWF avaient été exploitées alors qu’elles provenaient elles-mêmes de l’interview d’un glaciologue indien en 1999. Pour la rédaction du sixième rapport du GIEC, des mesures ont été prises, qui rapprochent davantage les différents groupes de travail afin d’éviter ce type d’écueils.
Bien que composé d’experts, le GIEC ne s’appuie pas sur ses propres recherches, mais sur une synthèse de la littérature scientifique actuelle afin de rassembler un maximum d’informations. Celles-ci sont issues du travail de milliers d’experts. Les sources sont citées avec transparence, ce qui permet aux lecteurs de mesurer eux-mêmes la fiabilité des chiffres et données énoncés.
Pendant ce temps, le climatoscepticisme ne faiblit pas
En dépit des annonces et multiples constats récents, des figures médiatisées continuent de monter au créneau, réfutant parfois même toute possibilité d’un lien entre le réchauffement climatique et l’activité humaine. Ce fut d’abord le cas de Claude Allègre notamment, avec son livre L’Imposture climatique publié en 2010. Allègre affirmait alors que les graphiques utilisés pour défendre l’idée d’un réchauffement climatique étaient truqués.
Or, l’ex-ministre ne se basait sur aucun fait scientifique pour étayer ses propos. Pire encore, il s’est avéré que les chiffres qu’il avançait dans son livre étaient eux-mêmes falsifiés. Le climatologue suédois Håkan Grudd avait réalisé un graphique montrant l’évolution des températures sur les 1 500 dernières années. Allègre a repris ce travail, mais en publiant des chiffres qui n’avaient rien à voir avec ceux initialement publiés dans la presse suédoise. En outre, certains faits scientifiques sur lesquels il s’appuyait étaient erronés. Entre autres affabulations, on pouvait lire que « le désert pompe l’humidité ». Si c’était vrai, cela se saurait.
Dans la même lignée, Christian Gérondeau, ingénieur en sciences polytechniques et auteur de plusieurs livres (dont La Religion écologiste), reprend le flambeau de la dénégation. Entre autres arguments, il dénonce une manipulation et une misanthropie de la part du mouvement écologiste. Selon lui, le niveau de la mer n’augmenterait que de 2 ou 3 millimètres par an. Or, deux études scientifiques récentes [2] démontrent que le niveau de la vaste étendue d’eau salée pourrait monter moins vite que prévu… c’est-à-dire de 60 à 90 cm d’ici 2100 au lieu des 100 cm pronostiqués par la communauté scientifique en 2016. Les deux auteurs nous mettent par ailleurs en garde contre un danger bien réel malgré tout.
De plus, Christian Gérondeau avance que de toute façon, « même si on supprimait nos émissions de CO2, cela ne changerait rien ». Ainsi, l’ingénieur (également président de la Fédération Française du Sport Automobile) invite les utilisateurs de 4×4 à ne pas culpabiliser. Des idées dangereuses et éloignées des réalités qui incitent à l’immobilisme, et la contradiction d’une pensée, qui passe subitement du climatoscepticisme au fatalisme. Christian Gérondeau est également l’auteur d’un livre intitulé L’Air est pur à Paris mais personne ne le sait. Une publication encensée par la presse conservatrice…
[1] IPCC. Global Warming of 1.5 °C : https://www.ipcc.ch/sr15/
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